Sous la plume de Laurent Gagnebin, l’athéisme apparaît comme une réalité complexe et résolument plurielle : celui d’un André Gide, d’un Albert Camus, d’un Jean-Paul Sartre Sartre, ou d’une Simone de Beauvoir, différents à plus d’un titre, déterminés qu’ils sont notamment par les origines religieuses dont ils sont l’émancipation. 
       Ce n’est ici pas d’abord le penseur chrétien qui, fort de ses convictions, interroge l’athéisme et le met en demeure de s’expliquer et de se justifier, mais le contraire. Inversion de taille qui signifie que la théologie se construit dans l’ouverture, par la confrontation et à travers le dialogue. Ce n’est pas une fois construite en système que la théologie s’expose à la critique, c’est en se confrontant à celle-ci qu’elle s’élabore, en demeurant ainsi en recherche, ouverte aux questions inédites et aux aspirations encore balbutiantes. 
       L’athéisme n’est pas seulement chez Laurent Gagnebin ce qui donne du grain à moudre à des théologiens en manque de stimulation, il est ce qui purifie la foi chrétienne elle-même. Et la confrontant à autre chose, l’athéisme relativise la foi dans ses énoncés dogmatiques et ses pratiques ; il la libère ainsi de l’esprit d’orthodoxie qui trop souvent l’étrangle. En l’appelant à plus de justesse doctrinale, l’athéisme sauve aussi la foi de l’obscurantisme qui l’étouffe. En dénonçant ses chimères et ses faux dieux, il la renvoie à l’Evangile lui-même, par-delà les institutions chrétiennes et ecclésiales. 
       Laurent Gagnebin nous offre dans ces ouvrages le récit d’une interrogation libre, sans faux-semblant, ni concession facile ; une mise en question radicale, stimulante et provocatrice, qui place chacun en demeure de s’expliquer sur ce qu’il pense, sur ce qu’il croit et ne croit pas. Non sans une juste fierté, Laurent Gagnebin rappelle que Simone de Beauvoir - après avoir rechigné à lire le manuscrit d’un jeune théologien analysant son œuvre, - lui écrivit : « On me lira mieux vous ayant lu. »

Editions Van Dieren


       Laurent Gagnebin, philosophe et théologien, a été pasteur de l'Église réformée de France, à l'Oratoire du Louvre et au Foyer de l'Âme à Paris, et professeur de théologie pratique et d'apologétique à la Faculté libre de théologie protestante de Paris. Il a - outre les quatre livres ici rassemblés - publié entre autres : Silence de Dieu - Parole humaine, le problème de la démythologisation (Lausanne, L'Âge d'Homme, 1978) ; Du Golgotha à Guernica ; Foi et création artistique (Paris, Les Bergers et les Mages, 1987) ; Christianisme spirituel et christianisme social, la prédication de Wilfred Monod (Genève, Labor et Fides, 1987) ; Quel Dieu ? (Lausanne, L'Âge d'Homme, 1990) ; Nicolas Berdiaeff ou de la destination créatrice de l'homme (Lausanne, L'Âge d'Homme, 1994) ; Albert Schweitzer (Paris, Desclée De Brouwer, 1999).